2.
1848-1898
Les années Elisabeth

 

 3.1.2.
1870-1914
Triple alliance face
à Triple entente

 3.2.
1914-1918
La Première Guerre
Mondiale

 4.
1918-1938
L'Autriche de
l'entre-deux guerres

A) 1903: coup d'état en Serbie

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Assassinat du roi et de la reine de Serbie le 28 mai 1903
© MARY EVANS/SIPA

Comme nous l'avons vu, en 1878, lors du Congrès de Berlin, la Principauté de Serbie, autonome au sein de l'Empire ottoman, acquiert son indépendance et devient le Royaume de Serbie. Jusqu'en 1903, le Royaume est gouverné par la dynastie des Obrenović.

Un coup d'État a lieu dans la nuit du 28 au 29 mai 1903. Le roi et la reine sont assassinés dans leur palais royal de Belgrade par un groupe d'officiers. Le pouvoir passe entre les mains de la dynastie rivale des Karađorđević. Il engendre des conséquences importantes sur les relations entre la Serbie et les autres puissances européennes, les Obrenović étant alliés de l'Autriche-Hongrie, tandis que les Karađorđević entretenaient des liens étroits avec la Russie et la France. La Serbie passe donc d'une proximité avec la Triple ALLIANCE (Allemagne Autriche-Hongrie Italie) à une proximité avec la Triple ENTENTE (France Russie Royaume-Uni).

Après le coup d'État, la vie en Serbie continua comme à son ordinaire, le nuveau Roi Pierre Ier (un Karađorđević) se mêlant peu de la vie politique. Cette période est cependant marquée par la montée en puissance de la Main noire, une société secrète créée en 1911 par les plus jeunes comploteurs du coup d'État de 1903 qui souhaitaient, après les guerres balkaniques, accélérer la réalisation de l'union nationale de tous les Slaves du Sud. C'est de cette organisation que sortira l'assassin de François-Ferdinand à Sarajevo en 1914, assassinat qui déclenchera la Première Guerre Mondiale.

B) 1905: première «crise marocaine» - coup de Tanger

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L'entrée de l'empereur Guillaume II à Tanger,
le 31 mars 1905

L'année 1905 n'est pas une année banale car la Russie a subi une terrible défaite face au Japon. Le tsar Nicolas II en sort profondément affaibli au point de vue international mais aussi en politique intérieure. Face à une Russie temporairement impuissante, le Reich va défier la France. La France est installée en Algérie depuis 1830 et a acquis durant le XIXème siècle un immense empire colonial en Afrique et en Asie. Malgré la force des puissances européennes, le Maroc a réussi à conserver son indépendance. L'Algérie faisant partie de la France et la Tunisie étant un Protectorat français, la France «s'intéresse» au Maroc pour étendre sa domination sur tout le Maghreb. La domination économique est déjà bien avancée. souhaitant s'opposer à la mainmise française sur le pays, mainmise qui organise autour des réformes que souhaite mettre en place le président français dans le pays, Guillaume II se rend à Tanger, prononce un discours enflammé dans lequel il affirme que le Reich défendra la souveraineté du royaume chérifien.

«J'espère que, sous la souveraineté chérifienne, un Maroc libre restera ouvert à la concurrence pacifique de toutes les nations, sans monopole et sans annexion, sur un pied d'égalité absolue. Ma visite à Tanger a pour but de faire savoir que je suis décidé à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour sauvegarder efficacement les intérêts de l'Allemagne au Maroc.»

Guillaume II à Tanger - 31 mars 1905


Guillaume II obtient du gouvernement français la démission de Théophile Delcassé, ministre français des affaires étrangères, partisan d'une politique de fermeté. Mais une conférence internationale tenue à Algésiras en 1906 est favorable aux intérêts de la France, soutenue par l'Angleterre et la Russie. Cette première «crise marocaine» est un échec pour l'Allemagne.

C) 1908: crise bosniaque

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Le Petit Journal lie expressément l'annexion
de la Bosnie-Herzégovine par l'Autriche-Hongrie
et l'indépendance de la Bulgarie.

© Supplément illustré du quotidien "Le Petit Journal" - 18 oct 1908

La Bosnie-Herzégovine est officiellement sous la souveraineté de l'Empire Ottoman mais administrée par l'Autriche-Hongrie depuis le Congrès de Berlin.

En 1908, la Révolution des Jeunes-Turcs a lieu dans l'Empire Ottoman et dans ce cadre, l'Autriche-Hongrie craint de perdre son emprise sur la Bosnie-Herzégovine. Elle décide - avec l'accord de l'Allemagne - d'annexer purement et simplement la Bosnie-Herzégovine, le 5 octobre 1908

L'annonce de l'annexion entraîne une crise internationale de grande ampleur. La Serbie, rêvant d'un Etat Slave uni mais consciente de ses moyens militaires limités, opte pour une internationalisation de la crise afin d'obtenir des compensations. Elle mobilise ses troupes et ordonne le boycott des produits austro-hongrois, tandis que l'Autriche-Hongrie mobilise également. Le prince héritier, François-Ferdinand, se montre partisan d'une solution militaire face aux Serbes soutenus par la Russie.

Mais le gouvernement français refuse de faire jouer sur cette question l'alliance avec Saint-Pétersbourg et conseille la modération aux Serbes. La Serbie, abandonnée à son sort face à la double monarchie, doit reconnaître l'annexion et, le 31 mars 1909, démobilise son armée et s'engage à entrentenir avec la double monarchie austro-hongroise des relations de bon voisinage.

Fausse alerte...

En plus signalons que le 5 octobre 1908, jour de l'annexion de la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie en profite pour s'auto-proclamer indépendante de l'Empire Ottoman. C'est un succès diplomatique des austro-hongrois qui soutiennent les bulgares depuis plus de vingt ans.

D) 1911: deuxième «crise marocaine» - coup d'Agadir

Après leur échec de 1905, les Allemands vont revenir à la charge concernant le Maroc. En mars 1911, le sultan du Maroc, menacé par une révolte, demande à la France de lui prêter main-forte. En mai, les troupes françaises occupent Rabat, Fès et Meknès. L'Allemagne, inquiète pour ses prétentions sur le pays, considère cette occupation comme une violation des accords d'Algésiras et décide de réagir. Guillaume II envoie une canonnière, puis trois, dans la baie d'Agadir - un symbole car cette baie avait été interdite jusqu'en 1881 au commerce étranger.

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La canonnière allemande «Berlin» devant Agadir
© André Morizet - L'Illustration - 16 septembre 1911

La France et l'Angleterre réagissent avec une violence que Guillaume II n'avait pas présagée. Aux termes d'âpres tractations, l'Allemagne renonce à être présente au Maroc, en échange de l’abandon par Paris de 272.000 km² de territoires d'Afrique équatoriale (au Gabon, au Moyen-Congo et en Oubangui-Chari) qui sont rattachés au Cameroun allemand.

Le 30 mars 1912, après des négociations ardues, la France peut, par le Traité de Fès, imposer au sultan son protectorat sur le Maroc. Ce bras de fer franco-allemand, qui annonce la Première Guerre mondiale, permet à la France d'éprouver son alliance avec la Grande-Bretagne. La Première Guerre mondiale aurait pu éclater en 1911, trois ans plus tôt que ce qui s'est finalement déroulé, sans l'habileté de Joseph Caillaux.

«En 1911, récidive: un navire allemand prit position devant Agadir, sur la côte marocaine du Sud, et le gouvernement de Berlin, après cette manifestation de force, notifia sa volonté d'obtenir une «compensation». Joseph Caillaux, qui gouvernait alors, transigea. La compensation fut accordée à l'Allemagne dans notre possession du Congo. Pour l'Allemagne, c'était non seulement un succès diplomatique, mais un avantage réel. La presse allemande tourna ces acquisitions en ridicule et se plaignit que le grand Empire allemand eût été joué.
Deux leçons sortaient de l'affaire d'Agadir: l'une, pour l'Allemagne, que le Maroc était un mauvais casus belli, parce que la France menacée gardait son alliance avec la Russie et son entente avec l'Angleterre, tandis que, sur un prétexte marocain, les Allemands n'étaient même pas suivis par l'Autriche-Hongrie. L'autre leçon était pour la France : nos concessions ne servaient qu'à convaincre l'Allemagne de notre faiblesse et à la rendre plus belliqueuse. Les deux leçons portèrent. L'Allemagne cessa de s'intéresser au Maroc et elle dirigea son attention sur les affaires d'Orient où la Révolution turque de 1908 et l'avènement de jeunes libéraux nationalistes à la place de la vieille Turquie avaient mis en mouvement, dans l'Europe balkanique et danubienne, les nationalités nouvelles dont les revendications menaçaient l'Autriche-Hongrie, Empire composite. Quant à la France, l'affaire d'Agadir amena au pouvoir les plus nationaux des hommes de gauche. Raymond Poincaré, républicain lorrain, qui n'acceptait pas la formule de Thiers — la «politique de l'oubli» — d'où était sorti le parti du rapprochement avec l'Allemagne, devint président du conseil en janvier 1912. »

Jacques Bainville, Histoire de France, 1924

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 «La France va pouvoir porter librement au maroc la civilisation, la richesse et la paix» 
L’iconographie des revues françaises est précieuse pour comprendre les messages que le pouvoir veut faire passer...
Par exemple Le Petit Journal, dont voici la couverture du supplément illustré du 19 novembre 1911

 

E) 1912-1913: première «guerre balkanique»

Après l'annexion de la Bosnie-Herzégovine par l'Autriche-Hongrie en 1908, les Balkans vont vivre quelques années d'accalmie car les grandes puissances (principalement l'Autriche-Hongrie et la Russie), souhaitent maintenir le statu quo dans la péninsule balkanique.

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Situation des Balkans en mai 1913, juste après la première guerre balkanique.
Lors du traité de Londres (mai 1913), les frontières n'ont pas été définies clairement. La carte représente les territoires contrôlés. L'absence de frontière claires provoquera la seconde guerre balkanique (juin-août 1913).
© Christophe Cagé - Creative Commons Attribution

Mais les choses vont bouger. Nikolaï Hartwig, le nouvel ambassadeur russe à Belgrade (capitale de la Serbie) conclut une vague alliance avec la Serbie et la Bulgarie le 7 mars 1912 avant d'être rejointes par le Monténégro puis la Grèce le 29 mai 1912. Le 15 octobre 1912, les états de la ligue balkanique entrent en guerre contre l'Empire Ottoman.

Rapidement menée, à la surprise générale, la Première Guerre Balkanique se solde par une défaite de l'Empire Ottoman, la perte de presque toutes ses possessions européennes et par un accroissement de la puissance de la Serbie et de la Bulgarie.

Le Traité de Londres conclut la Première Guerre Balkanique le 30 mai 1913. Tous les territoires ottomans à l'ouest d'une ligne Enez-Kıyıköy (Enos-Midia) - ligne droite sur la carte ci-contre - furent cédés à la Ligue balkanique et répartis entre les différents alliés suivant la ligne de front au moment de l'armistice.

Conformément aux vœux de l'Autriche-Hongrie le traité permit également la création de l'Albanie en tant que nation indépendante. La quasi-totalité de son territoire était occupée par la Grèce, le Monténégro et la Serbie, qui se retirèrent à contrecœur.

Cet accroissement de la puissance serbe inquiète le gouvernement austro-hongrois; les responsables austro-hongrois incitent donc leur allié bulgare à déclencher les hostilités contre la Serbie.

F) 1913: deuxième «guerre balkanique»

La Deuxième Guerre Balkanique (du 16 juin au 18 juillet 1913) eut pour objet le partage des gains de la Première Guerre Balkanique, non-conforme aux accords initiaux; elle opposa la Bulgarie à ses anciens alliés, la Serbie et la Grèce, qui, mis en difficulté, appelèrent à la rescousse la Roumanie.

Lorsque les troupes roumaines approchèrent de la capitale Sofia, la Bulgarie demanda un armistice qui déboucha sur le traité de Bucarest, dans lequel la Bulgarie dut renoncer à ses revendications, céder une partie de ses gains de la Première Guerre Balkanique à la Serbie, à la Grèce et à l'Empire Ottoman, et en plus céder une partie de son territoire initial à la Roumanie, ce qui créa des différends territoriaux avec ses voisins.

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Situation des Balkans en mai 1913, juste après la seconde guerre balkanique.
Lors du traité de Bucarest (août 1913), les frontières sont enfin définies clairement, sauf pour l'épire du nord, dont le sort ne sera réglé qu'au traité de Florence du 17 décembre 1913..
© Christophe Cagé - Creative Commons Attribution

La guerre provoqua la rupture de l'alliance russo-bulgare, laissant la Serbie comme seule alliée de la Russie dans cette région importante. C'est pour cela que la Serbie reçut le soutien total de la Russie lors de la crise de juillet 1914 qui mena à la Première Guerre Mondiale, et c'est aussi pour cela qu'en 1915 la Bulgarie s'allia aux Empires centraux dans l'espoir de réunir à elle les territoires (à majorité bulgarophone) qu'elle n'avait pu gagner lors des deux guerres balkaniques.

G) Deux blocs face à face

Un redoutable système d’alliance a été mis en place en Europe où deux blocs se font face:

Triple Alliance Triple Entente
Allemagne
Autriche-Hongrie
Italie
France
Royaume-Uni
Russie


Rappelons aussi que l'Italie a des accords secrets avec la France et que la Russie est devenue une alliée naturelle de la Serbie. Enfin, l'Autriche-Hongrie est toujours un amoncellement de nationalités...

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Alliances militaires en Europe (1914-1918)
© Creative Commons - historicair