1.
946-1848
Avant le règne
de François-Joseph Ier

 2.1.
Acte I
Musical
Elisabeth

 2.2.13.
Acte II Scène 11
NOVEMBRE 1888
Corfou

 2.2.15.
Acte II Scène 13
30 JANVIER 1889
Mayerling

 3.
1898-1918
Fin du règne
de François-Joseph Ier

Lieu

Personnages

Villa Hermès, banlieue de Vienne Élisabeth et Rudolf, son fils


A) Élisabeth et son fils

Après le père, voici le fils.

Est-ce à nouveau une apparition?

Ou est-ce le cas seulement de la première partie de la scène comme semble l’indiquer la didascalie de milieu de scène: Élisabeth a enfin terminé sa séance de spiritisme?

C’est très différent car dans le cas où la première partie se déroule dans sa tête, elle est consciente de tous les reproches de son fils. Dans le cas contraire, son fils essaie de l’éclairer.

Quoi qu’il en soit, nous avions quitté Rudolf dans la scène 9 où il discutait avec La Mort. Une discussion très sereine. Il parle de La Mort comme de son ami. Mais à ce moment de l'histoire, le drame de Rudolf est double. Le premier est ancien et le second est relativement récent.

 Acte II – Scène  9   
RUDOLF
OH, JE NE T’AI PAS OUBLIÉ
MON AMI, VERS QUI JE CRIE
QUAND MES PEURS ME DÉVORENT

A.1) Mariage de Rudolf avec Elisabeth de Belgique

Comme nous l’avons vu, Rudolf dans sa jeunesse était un chaud lapin et fréquentait les bordels. François-Joseph laissait faire car il ne voulait pas que son fils vive ce qu’il avait vécu lui-même.

Mais, l’âge avançant, le François-Joseph avait jugé que Rudolf ne pouvait poursuivre sa collection de conquêtes en se contentant de passades. L’empereur veut mettre fin aux «désordres» de son fils: il y a trop de femmes autour de lui. Rudolf est le prince héritier, pas seulement un trophée de chasse amoureux!

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Fiançailles de Stéphanie et Rodolphe en mars 1880
©
Photographie de Louis-Joseph Ghémar à Bruxelles

Avec sa méticulosité habituelle, François-Joseph passe en revue les candidates dignes d’épouser le futur souverain d’Autriche-Hongrie. Élisabeth s’en mêle. La discussion est serrée, mais elle obtient que Rudolf soit libre de son choix - à condition, exige l’empereur, que la fiancée soit une princesse, d’une Maison régnante et catholique. Encore un compromis du couple! L’Empereur n’en dit pas plus sur les éventuelles qualités de sa future belle-fille. L’amour, le désir de vivre ensemble, le bonheur? On verra plus tard! Comme à Élisabeth en son temps, on laissera à l’élue 24 heures pour se décider... Dans la réalité, c’est François-Joseph qui va choisir… Enfin «suggérer avec insistance».

Qui est l’élue? Stéphanie de Saxe-Coburg, fille de Leopold II de Belgique. Élisabeth est horrifiée car la jeune fille n’a que 14 ans! Et elle se souvient de sa nuit de noces à elle. Elle ne peut tolérer que quelqu’un repasse par là. François-Joseph a une formule très claire: l’histoire ne se reproduit pas! En route pour Londres, Élisabeth «passe» par Bruxelles durant l’hiver 1878-1879 pour qu’on lui présente la jeune fille.

Élisabeth repart en Angleterre durant l’hiver 1880. Passant par Londres, elle reçoit un télégramme de François-Joseph. Elle l’ouvre et blêmit:

«Le prince héritier s’est fiancé avec la Princesse Stéphanie de Belgique.»


François-Joseph demande à sa femme de passer par la Belgique à son retour d’Angleterre pour rencontrer les parents de la fiancée de son fils. Elle s’exécute. Elle y apprendra que Stéphanie n’est pas encore pubère. Elle apprend aussi que son fils qui les a rejoint à Bruxelles y est venue avec sa maîtresse du moment, Mme Fischer, une comédienne. Elle se tait car elle veut en parler à François-Joseph resté à Vienne. À son précepteur, Rudolf confie:

«Une nouvelle vie va bientôt commencer pour moi et je dois avouer que cela m'inquiète un peu.»

Rudolf


La discussion entre François-Joseph et Élisabeth va vite s’envenimer. Enfin, Élisabeth obtient que la date du mariage ne soit ni fixée ni annoncée. En l’apprenant, Rudolf se plaint du peu d’empressement de sa mère à l’égard de sa fiancée. Élisabeth espère aussi que son fils change d’avis. Il est comme elle, imprévisible. Élisabeth est en outre persuadée que la Belgique porte malheur aux Habsbourg, Charlotte avait épousé Maximilienh qui sera exécuté comme Empereur du Mexique. Lors de son passage à Bruxelles, elle avait demandé de rendre visite à Charlotte qui était maintenant «enfermée». Cela l’avait traumatisée.

Les fiançailles sont déjà officialisées le 7 mars 1880. Stéphanie se souviendra:

«Dans l'après-midi du 5 mars, mes parents me firent appeler. Lorsque je fis mon entrée, mon père [Leopold II] se leva, vint à moi et me dit d'une voix grave: «Le prince héritier d'Autriche-Hongrie est venu ici pour demander ta main. Ta mère et moi, nous nous prononçons en faveur de ce mariage. Nous t'avons choisie pour être impératrice d'Autriche et reine de Hongrie. Retire-toi, réfléchis et donne-nous ta réponse demain.»»

Stéphanie de Belgique


Marie von Wallersee-Larisch, nièce de l'impératrice Élisabeth avait déclaré à propos de la future fiancée de Rudolf :

«D'avance, nous avions pitié de la pauvre princesse qui aurait l'honneur d'être choisie.»

Marie von Wallersee-Larisch


En mars 1881, soit un an plus tard, une missive timide et triomphante de la reine des Belges annonce que Stéphanie, à près de 17 ans, a eu un premier cycle. Les deux monarchies se dépêchent de fixer la date du mariage. Ce sera en mai 1881. «Un cycle, ce n'est rien!» s'emporte Élisabeth. Un cycle, répond le protocole, est le signe suprême que le mariage est consommable. Élisabeth avait bien traversé un arrêt des règles après ses noces, cela n'avait en rien empêché ses maternités. Elle se détourne, impuissante, consternée.

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Mariage de la princesse Stéphanie de Belgique avec l’archiduc Rodolphe d’Autriche
Église des Augustins à Vienne (Autriche), le 10 mai 1881
©
The Graphic (United Kingdom), 21 Mai 1881
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Le prince héritier Rudolf et Stéphanie en 1882
©
Photographie de Heinrich Eckert

Les noces de son fils... Tout rappelle à Élisabeth le calvaire somptueux de son mariage. Les quatre jours de festivités où Vienne déploie le meilleur de son accueil. Tout rappelle à Élisabeth la cérémonie religieuse à l'église des Augustins. La toilette de la mariée, à peine plus âgée qu’elle ne l'était alors. Dès son arrivée, Stéphanie - qui ne sait rien de Vienne et ses palais - avait été conduite à Schönbrunn. Élisabeth sombrait dans l'intolérance. Une colère retenue, une révolte intérieure si véhémente, jusqu'à l'hostilité. Le bal de la Cour, le dîner si lent, la présentation, debout, de la jeune mariée aux dignitaires et au cercle des dames... Élisabeth revivait ce cauchemar jamais oublié. Et pourtant elle va se montrer identique à ce que Sophie fut pour elle.

Selon le journal de Stéphanie, ce fut une nuit d’horreur. «Quelle nuit! Quel supplice! Quel dégout!» Les trois nuits d'Élisabeth réunies en un seul pugilat dont la jeune femme émergeait, terrifiée. Il y eut un mystère dans la suite de ces premières offenses. Stéphanie réagit avec une intelligence et une grâce qui surprirent tout le monde - Rudolf en premier. Elle sut tenir, si jeune et blessée, le rang exigé d'elle. Elle sut atténuer la véhémence de ce garçon sensible, maladroit, qui ne demandait qu'à savoir aimer. Elle lui donna de la tendresse et il apprit à la ménager, la mener à l'amour. Elle sut, au cours des semaines qui suivirent, se faire attentive à ses idées, ses travaux. Elle l'écoutait. C'était la première fois, depuis le départ de Gisèle, sa soeur, et la mort de sa grand-mère, Sophie, qu’une créature féminine lui prêtait autant d'attention. À la surprise générale, ils s'éprenaient l'un de l'autre.

Élisabeth boudait. Son rejet envers sa belle-fille empirait. Jalousie, dépit, égocentrisme contrarié de ne plus être l’unique objet d'amour de son fils?

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Le prince héritier Rudolf avec sa famille
©
photographie originale d'après un tableau de J. Plagemann - Château de Schönbrunn Kultur- und Betriebsges.mbH

A.2) Un amour sincère mais éphémère

Comme dans tout mariage dynastique où prime l'intérêt politique des deux maisons souveraines, l'existence de sentiments amoureux au sein du couple n'a jamais été prouvée, mais la relation des jeunes époux est basée, au début, sur un respect et un attachement mutuels. Leur belle histoire d'amour allait durer quatre années.

Sa belle-mère, Élisabeth, surnomme sa bru «le hideux dromadaire», cependant, Stéphanie commence à goûter à sa nouvelle position. Lors d'une visite officielle en Hongrie, en mai 1881, elle est ovationnée et mesure les avantages de sa situation.

A l'automne 1881, Stéphanie pense être enceinte, mais les médecins se sont trompés. Après cette déception, en avril 1883, elle est enceinte. Il déborde d'attentions. Elle s'offusque de son anticléricalisme – Rudolf reste un activiste politique – mais il interrompt son interrogation par des baisers. Sa grossesse se passe bien, l'accouchement sera pénible. Pendant une trentaine d’heures, à Laxenbourg, tradition si dure, Rudolf ne la quittera pas un instant. Les prénoms ont été décidé avec François-Joseph: Wenzel (contraction de Wenceslas, héros tchèque – ni autrichien ni hongrois…) si c'est un garçon et Élisabeth, si c'est une fille.

Le 2 septembre 1883, Stéphanie mettait au monde, dans un grand cri, une petite fille. Rudolf est fou de bonheur. Stéphanie pleure de déception. «Une fille, dit-il, c'est tellement plus gentil.» François-Joseph a offert une émeraude de grand prix. Élisabeth est restée distante.

 Acte II – Scène 12  
RUDOLF
COMBIEN SOUVENT AI-JE
ATTENDU QUE TU PARLES AVEC MOI.
COMME J’ESPÉRAIS,
QUE TU ROMPES ENFIN LE SILENCE.


Au milieu des années ’80, Rudolf a glissé dans une neurasthénie active. Il disait a Stéphanie – et jamais à sa mère:

«Je ne vivrai pas longtemps, je ne serai jamais empereur.»

Rudolf

 


Rudolf allait moins bien qu'au début de son mariage. Fils œdipien, sa passion pour sa mère était sans cesse contrariée. Elle le fuyait - comme elle fuyait l'Empereur et Vienne. Qui pourrait la retenir enfin auprès d’eux? Un tombeau? Un asile? Elle aimait les fous et la mort... Voulait-il qu'elle remarque à quel point leurs idées étaient proches? Comme nous l’avons vu, quitte à déplaire violemment à son père, il s'entourait de libéraux dont le journaliste hostile à l'empereur, Moriz Szeps, … Était-ce pour attirer sa mère?

 Acte II – Scène 12  
RUDOLF
SI J’ÉTAIS TON MIROIR,
TU TE VERRAIS EN MOI.
ALORS CELA NE SERAIT PAS SI DIFFICILE
DE COMPRENDRE CE QUE JE NE DIS PAS,

JUSQU’À CE QUE TU TE TOURNES,
PARCE QUE TU TE RECONNAIS SI BIEN EN MOI.
TU M’ATTIRES
ET NE ME LAISSES JAMAIS T’APPROCHER.
QUAND JE TE REGARDE,
TES YEUX S’ÉCARTENT TOUJOURS DE MOI.


Lors d’une chasse, il avait lance a son cousin François-Ferdinand: «Tu seras le futur empereur d'Autriche.» C'est le François-Ferdinand qui sera assassiné en 1914 ce qui provoquera la Première Guerre Mondiale, et n'aura donc jamais été Empereur. Rudolf signait son précoce acte de décès où on reconnaissait la mélancolie morbide de sa mère. Mourir jeune. Pourquoi? Il était moins heureux avec Stéphanie. Ses idées, à la longue, révoltaient la très conventionnelle archiduchesse. Très croyante, elle s'effrayait de son anticléricalisme, de ses goûts choquants pour les tripots.

Il l'entraîna, à sa grande honte, dans une sordide guinguette, près de Vienne. Il aimait y boire jusqu’à en vomir, manger des saucisses et tutoyer les filles dénudées qui le tutoyaient.

«On resta assis, jusqu'à l'aube à des tables sales... non desservies. Des cochers jouaient aux cartes, sifflaient et chantaient. On dansait, des filles sautaient sur les tables et les chaises... chantant de rengaines vulgaires... Je ne comprenais pas ce que le prince héritier y trouvait.»

Journal de Stéphanie

 

 

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Le «salon turc» de Rudolf à la Höfburg
©
Wien Museum

Rudolf n'aime pas vivre à la Hofburg où il a conservé, dans l'aile opposée aux appartements de Stéphanie, sa garçonnière de jeune homme.

Ses maîtresses l'y rejoignent, avec la complicité de Bombelles. Un dédale de corridors, d’escaliers de plus en plus étroits jusqu'à une certaine porte en fer. C'est là.

Une chambre obscure. Dans l'entrée, un corbeau empaillé; sur le bureau du prince, un revolver noir, un crâne humain qu'on lui a donné lors d'une visite à l'institut médical.

Cette macabre mise en scène effraye ou fascine les femmes qui entrent ici pour coucher avec lui. Dans quelques années, son dernier amour, Mary Vetsera, sera perversement excitée par cet étalage morbide. Stéphanie ne s'est jamais aventurée du côté de l'«aile de l'adultère». «Ses genoux tremblaient» quand la tentation la prenait d'y foncer.

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Appartement de Rudolf à la Höfburg ... et trajets pour y accéder discrètement

A.3) La maladie

La santé de Rudolf se détériora brusquement en 1886. Il avait 27 ans. Tout commence par une toux spasmodique qui n'est pas sans rappeler celle d’Élisabeth au temps de Madère. Rudolf est devenu irritable, il tourmente Stéphanie. Il lui fait une étrange proposition qui l'épouvante: se tuer avec elle. Stéphanie, atterrée, tente de se confier à l'empereur qui l'aime bien. Paisible, évitant de creuser un tel souci, François-Joseph la réconforte gentiment:

«Ne te monte pas la tête pour rien, il a besoin de toi, reste auprès de lui.»

François-Joseph cité dans le journal de Stéphanie

 

Mais François-Joseph n'a pas tout dit. Sa police lui a remis de douteux rapports. Son fils entretient une liaison avec Mizzi Caspar (présentée au Prince par Frau Wolf) que tout Vienne appelle «la grande cocotte». Il l'a installée dans une somptueuse demeure coûtant cinq cent mille florins. Il est de plus en plus l’ami des ennemis politiques de son père, ces libéraux haïssant le régime impérial.

En réponse, son père le relègue à des fonctions représentatives. Sa toux, ses malaises augmentent. De la débauche au travail sans relâche, il se surmène. Ses rapports sont de plus en plus travaillés mais jamais son père ne l'en félicite. Mais son médecin finira par avouer et prononcer le mot à connotation mortelle: la syphilis que les filles, au bordel, ont léguée à l’unique héritier des Habsbourg.

SCANDALE ABSOLU.

 Acte II – Scène 12  
RUDOLF
MAMAN, J’AI BESOIN DE TOI ...
JE VIENS DANS LA PLUS GRANDE DÉTRESSE,
JE ME SENS PRISONNIER ET CERNÉ.
MENACÉ PAR LE DANGER
D’ÊTRE DESHONORÉ DEVANT TOUT LE MONDE.
À TOI SEULE JE PEUX CONFIER CE DONT IL S’AGIT.
JE NE VOIS PLUS D’ISSUE ...
ELISABETH
JE NE VEUX PAS SAVOIR ...
RUDOLF
... LA COUR ET LE MARIAGE SONT POUR MOI UNE AGONIE.
MOI, MALADE, MA VIE VIDE ...
ELISABETH
... JE NE PEUX PAS TE L’ÉPARGNER !

 

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Le prince héritier Rudolf en uniforme des Hussards
Il était déjà atteint de la Syphillis
©
Photographe Karl Koller en 1887

La syphilis fait beaucoup souffrir. Des maux de têtes affreux, une infection généralisée. Les ganglions se répandent dans le sang, la dégradation physiologique est visible, les douleurs articulaires sont insoutenables, la fièvre perdure accompagnée de maigreur, nausées, d'hallucinations et de folie. La souffrance, sans trêve. La honte, sans trêve.

Stéphanie sera contaminée par son mari. Les même signes, en moins graves, sont apparus chez la princesse. Le médecin s'était empressé d’envoyer Rudolf en cure mais les bains, la prise des eaux n'apportent aucune amélioration. Seul l'opium, la cocaïne, la morphine que lui fournit Bombelles calment un peu ses maux.

Pourquoi a-t-il osé continuer de criminels rapports avec Stéphanie? Autodestruction? Obsession du «suicide» à deux? Désespoir nihiliste? Rejet de son père, absence de sa mère, immense solitude? Folie déjà engagée? Il a perdu sa beauté, ses cheveux, une partie de ses dents. Sa vue baisse, ombragée d'un funeste nuage. Il est revenu à Vienne où son médecin lui prescrit du sulfate de zinc.

Il finira par avouer à Stéphanie le mal dont elle souffre, et que c’est lui qui l’a infectée. Stéphanie a poussé un cri horrifié, elle si contrôlée. Mais l'inflammation, chez une femme, gagne les trompes, compromet à jamais la fécondité. Elle est en danger de mort, on l'a assassinée. Elle n'a qu'une fille et la dynastie est à jamais éteinte. La voilà en proie à toutes les malveillances, elle, l’innocente. Sa vie de femme, sa vie de mère s'achevaient à l'âge de 23 ans.

La nouvelle retentit aux oreilles de l'empereur comme un glas. Désabusé, Rudolf sent rôder la mort. Élisabeth est totalement, à cette époque, hantée des malheurs de son cher cousin, Louis II (qui va mourir en juin de la même année, 1886). Elle n'aime pas Stéphanie. Les chemins se séparent, Rudolf sait que sa mère est indifférente et que jamais Stéphanie ne lui pardonnera. Six années après leur mariage, le couple est brisé. Rudolf va vers son destin, La Mort.

A.4) Mary Vetsera, l’énigme

L’histoire est simple et banale. La jeune baronne Mary Vetsera, 17 ans, est amoureuse de Rudolf. Enfin… elle découpe dans les journaux les photos du Prince et les conserve dans sa chambre. Elle l'aime! Elle l'aime! Avec cet amour «adolescent» Mary va forger son destin et provoquer - ou rendre possible du moins - la tragédie de Mayerling. Rudolf n’a jamais remarqué ni parlé à la jeune fille. Grâce aux manigances de sa mère, elle va obtenir une rencontre avec Rudolf. Ce dernier la reçoit le 5 novembre 1888 … dans sa garçonnière!

Mary était ivre d’amour pour Rudolf. Rudolf a plutôt été attiré par sa fougue et sa jeunesse. Une proie facile: il a 30 ans et est Prince; elle a 17 ans et lui dit clairement… vas-y!

Le 26 janvier 1889, à neuf heures du matin, Rudolf est convoqué par son père dans son bureau. Nul ne sait ce que se sont dit l’empereur et son fils, sinon qu’il y eut entre eux une altercation TRÈS VIOLENTE.

Plusieurs hypothèses peuvent expliquer la colère du père. La plus souvent évoquée est une lettre reçue du Vatican dans laquelle le pape révèle que Rudolf comptait demander l’annulation de son mariage. Pour Rome comme pour Vienne, il ne saurait en être question. François-Joseph aurait donc ordonné à son fils de se réconcilier avec sa femme, de mettre fin à sa nouvelle liaison avec la très jeune baronne Mary Vetsera dont tout Vienne se fait l’écho.

Il doit être présent au dîner de famille prévu à la Hofburg le 29, trois jours plus tard, où François-Joseph exige de son fils que la bonne entente retrouvée du couple Rudolf-Stéphanie soit totalement évidente pour les hôtes.

 Acte II – Scène 12  
RUDOLF
... LA COUR ET LE MARIAGE SONT POUR MOI UNE AGONIE.
MOI, MALADE, MA VIE VIDE ...
ELISABETH
... JE NE PEUX PAS TE L’ÉPARGNER !
RUDOLF
... ET MAINTENANT CE SCANDALE MISÉRABLE !
UNIQUEMENT SI POUR MOI
TU INTERCÉDAIS AUPRÈS DE L’EMPEREUR,
ALORS IL NE SERAIT PAS TROP TARD!
Rudolf veut se diriger vers Elisabeth. Pourtant il se souvient que sa mère est inatteignable.
ELISABETH
JE ME SUIS ELOIGNÉE DEPUIS LONGTEMPS DE L’EMPEREUR,
J’AI COUPÉ TOUS LES LIENS.
JE NE SUPPLIE JAMAIS. – JE NE LE FERAI MÊME PAS POUR TOI.
Elisabeth tourne de nouveau le dos à Rudolf. La musique s’interrompt. La scène devient sombre. Changement de décor.
RUDOLF
Donc tu me laisses tomber...

 

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La Baronne Mary Vetsera en 1887
©
Österreichische Nationalbibliothek

Deux jours plus tard, le 28 janvier 1889, l’archiduc Rudolf décide de partir chasser aux environs de Vienne dans son pavillon de Mayerling. Avant de partir, à onze heures du matin, il embrasse sa fille Élisabeth et prend congé de Stéphanie en lui donnant rendez-vous au dîner familial du lendemain soir. Le 29, à cinq heures cinq de l’après-midi, Stéphanie reçoit un télégramme de Rudolf lui expliquant qu’étant très enrhumé, il ne pourra assister au dîner et qu’il restera ce soir à Mayerling. Stéphanie est atterrée: le «dîner de réconciliation» n’aura pas lieu, mais le dîner de famille sera maintenu quand même, car il s’agit aussi d’un dîner de fiançailles: Marie-Valérie (la fille préférée d’Élisabeth) avec l’archiduc François-Salvator, de la branche toscane des Habsbourg. Sont présents, outre le couple souverain, Stéphanie, les fiancés, sept archiducs, quatre archiduchesses, le prince de Reuss, ambassadeur d’Allemagne, et son épouse, le comte de Meran et le prince Philippe de Saxe-Cobourg, rentré de la chasse en fin d’après-midi. Le seul absent est Rudolf. Il a choisi de passer la nuit à Mayerling….

Pas mal pour les fiançailles de sa sœur et un «dîner de réconciliation» avec sa femme!