D) Hallelujah, I'm A Bum (1933)

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«Hallelujah, I'm A Bum»

Hallelujah, I'm A Bum () était le premier et probablement le dernier musical Hollywoodien qui se préoccupait presque entièrement des problèmes de la Grande Dépression qui a suivi la crise de '29. Pendant ces années, tant de gens ont perdu leur emploi, leur argent et leur maison qu’ils ont été forcés de vivre partout où ils pouvaient trouver quelques mètres de terrain vacant. Dans le film, Rodgers et Hart se sont concentrés sur les clochards qui vivaient à Central Park, avec l'icône du cinéma parlant, Al Jolson, jouant le rôle de Bumper, leur chef. On retrouvait aussi Harry Langdon dans le rôle de Egghead, un radical qui appelle la police «les cosaques de Hoover» et Frank Morgan dans le rôle du Maire Jimmy Walkerish qui a toujours au moins deux heures de retard à ses rendez-vous et qui passe la plupart de son temps au Park Casino.

Rodgers et Hart ont essayé de garder une partition relativement légère même si le thème s'y prêtait difficilement. Le sujet des sans-abri à une époque où c’était un problème national si urgent ne prêtait spontanément pas à rire ou à chanter.

Hallelujah, I'm A Bum () a été produit par Joseph Schenck chez United Artists, avec Lewis Milestone comme réalistaeur. Milestone était un réalisateur très imaginatif qui partageait avec Mamoulian une haine constante de faire le même genre de film deux fois.

Que racont ce film? Bumper (Al Jolson) est un vagabond, leader d’un étrange groupe d’excentriques qui traînent autour de Central Park à New York. Parmi ses adeptes figurent Egghead (Harry Langdon), Sunday (Chester Conklin), Acorn (Edgar Conner), The General (Victor Potel), Orlando (Tammany Young) et Apple Mary (Louise Carver). L’idole de Bumper est le maire Hastings (Frank Morgan), dont il a sauvé la vie et avec qui il déjeune fréquemment au Park Casino. Bumper est toujours à portée de main pour ouvrir la porte de la Rolls Royce du maire, et ce dernier se fait un point d'honneur de s’attarder un moment à l’entrée et écouter la philosophie et les idées fantasques de Bumper sur la vie. Grâce à son contact avec le maire, Bumper est capable d'«influer» sur les choses quand les autres vagabonds ont des problèmes. De son côté, le maire ne comprend pas pourquoi Bumper, un homme exceptionnellement brillant, se contente de passer sa vie dans le parc, ne faisant rien.

Le maire, malgré tout son pouvoir et sa popularité, est malheureux. Il est amoureux - et follement jaloux. Il croit que sa bien-aimée June Marcher (Madge Bellamy) a une «double vie». Lors d'un déjeuner, il glisse 1.000$ dans son sac à main. Mais elle égare son sac et le maire l’accuse de l'avoir donné à un autre homme. Bumper retrouve le sac à main et l’apporte à l’adresse contenue dans le sac à main. C'est le maire, très énnervé, qui l'accueille. Il ne voit pas June, qu'il ne connait pas par ailleurs.

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«Hallelujah I'm a Bum» (1933)
Chester Conklin (Sunday), Madge Evans (June) and Al Jolson (Bumper)

Plus tard, après cette crise, la malheureuse tente de se suicider en sautant d’un pont et est secourue par Bumper, mais elle a perdu la mémoire. Il l’emmène chez Sunday. Il se rend ensuite chez le maire, lui expliquant qu'il a un nouvel intérêt dans la vie, connu sous le nom d’Angel. Pour cette raison, il demande au maire de lui trouver un travail. Il dépense tout son argent pour rendre Angel heureuse et elle tombe amoureuse de lui. Pendant ce temps, le maire, découragé de ne pas être en mesure de localiser June disparue, participe à une beuverie et est retrouvé endormi dans le parc par les amis de Bumper, qui le ramènent chez lui et préviennent Bumper. Pendant que Bumper essaie de le dessoûler, Hastings commence à parler à une photo. Bumper découvre que la femme sur la photo est celle d’Angel, et que la fille de ses rêves est la chérie du maire. Bumper emmène son ami chez Sunday. La vue du maire et sa voix alors qu’il la serre dans ses bras restaure la mémoire de Sunday. Elle supplie d’être emmenée loin de «cet horrible endroit». Tout ce dont elle se souvient c’est de marcher dans le parc la nuit. Bumper est un étranger pour elle. Le maire la soustrait à la vie de Bumper qui retourne au parc et à son ancienne vie.

Al Jolson chantant «Hallelujah I'm a Bum» dans le film «Hallelujah I'm a Bum» (1933)

Hallelujah, I'm A Bum () a permis à Rodgers et Hart de poursuivre une de leurs tentatives d’innovation, déjà expérimentée dans Love me tonight () et The Phantom President (), qu’on appelait alors le dialogue rythmique, bien qu’un meilleur terme pourrait être «dialogue musical». Il s'agit de rythmer les conversations, via un accompagnement musical, pour faciliter les transitions vers les chansons et donner au film une structure musicale plus ferme. Il était similaire au récitatif à l’opéra, sauf qu’il était fait dans le rythme et était une partie authentique de l’action.

Juste pour la petite histoire, le rôle de June avait d’abord été proposé à la femme d’Al Jolson, Ruby Keeler, mais elle a décidé qu’elle ne voulait pas faire ses débuts au cinéma face à son mari. Cela s’est avéré être une bon choix, du moins pour elle, car son premier film, 42nd Street (), a été un succès majeur tandis que Hallelujah, I'm A Bum () a été un un flop majeur. A un tel point que la poids sur Jolson d'avoir une femme devenue plus populaire que lui, a conduit à la rupture de leur mariage.

Mais malgré cela et contrairement à leur expérience avec Cohan sur The Phantom President (), Rodgers et Hart ont trouvé que travailler sur Hallelujah, I'm A Bum () était presque aussi excitant que sur Love me tonight (). Jolson avait la réputation de pouvoir se révéler difficile mais ila été un homme doux durant tout le tournage. Quoi qu'il en soit, ce fut un nouveau flop...