Un amour naissant en pleine guerre des gangs

Soixante-cinq ans après sa création, West Side Story n’a rien perdu de sa modernité et de son actualité. Nous sommes très fiers de vous présenter au Festival Bruxellons! ce chef d'œuvre immortel de la comédie musicale qui, emporté par la musique de Leonard Bernstein et les mots de Stephen Sondheim, célèbre le choc des corps.


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Intégralement traduite en français, la célèbre comédie musicale vibre sous un jour nouveau, grâce à une troupe de 25 interprètes d’exception et un orchestre live. À ne manquer sous aucun prétexte d’ici au 26 août, au château du Karreveld.

Il en fallait du cran, et sans doute un petit grain de folie aussi, pour s’attaquer à un tel monument de Broadway, qui plus est, encore tout récemment, adapté au cinéma par Steven Spielberg. Et, pourtant, ils ont relevé le pari ! Brillamment ! Jeudi, soir de la première, le public du Château du Karreveld était debout, exalté, applaudissant à tout rompre les 25 interprètes de la célèbre comédie musicale West Side Story et les 17 musiciens, dirigés par Laure Campion, qui les accompagnent chaque soir en live.

Après, entre autres, My Fair Lady, Blood Brothers, Elisabeth, le festival Bruxellons !, qui fête ses 25 ans cet été, confirme, une nouvelle fois, qu’il n’a à rougir ni de son talent ni de son audace à présenter des comédies musicales intégralement traduites en français (chansons comprises), et ce, grâce à la complicité de l’adaptateur/traducteur Stéphane Laporte.

Dépasser le drame romantique
Créée en 1957 au Winter Garden Theatre à New York, sur une idée originale du chorégraphe Jerome Robbins, West Side Story remporte un succès immédiat. Version des temps modernes de Roméo et Juliette, ce musical raconte l’histoire d’un amour impossible dans le New York des années 50. À cette époque, la rivalité entre gangs fait rage. Dans le quartier de l’Upper West Side, c’est “la guerre” entre les Sharks, formés de jeunes Portoricains, et les Jets, qui se revendiquent en “vrais” Américains, même s’ils sont nés de familles émigrées de Pologne, d’Irlande, etc. Un soir, au bal, Maria, sœur de Bernardo, chef des Sharks, et Tony, ex-membre des Jets, tombent fous amoureux. Mais Bernardo ne l’entend pas de cette oreille…

Bien qu’elle a été jouée et adaptée à maintes reprises aux quatre coins du monde, West Side Story parvient à vibrer sous un jour nouveau au Karreveld. Sans rien trahir de l’œuvre originale d’Arthur Laurents (livret), Leonard Bernstein (musique) et Stephen Sondheim (paroles) et de son esprit, les deux metteurs en scène, Daniel Hanssens et Kylian Campbell, sont parvenus à créer une version éblouissante qui dépasse le drame romantique (il n’est pas question que de testostérone et de bagarres, et les femmes ont leur mot à dire) et dénonce la violence, celle d’hier mais aussi d’aujourd’hui.

La voix cristalline de Romina Palmeri
Plus moderne dans sa dramaturgie, cet opus l’est aussi dans ses parties dansées : les deux chorégraphes, Kylian Campbell et Antoine Pedros, ont pu laisser libre cours à leur imagination, s’inspirant des danses urbaines et latines. Le résultat est une vraie réussite. Les danseurs de la troupe allient avec une aisance folle interprétation et justesse technique.

Quant aux deux rôles principaux, Maria et Tony, ils sont tout simplement exceptionnels. La voix cristalline de Romina Palmeri est sublime ; l’émotion vocale de Kaplyn est saisissante. Fabuleuse en Eliza Doolittle dans My Fair Lady, Marina Pangos l’est tout autant en Anita, la fiancée de Bernardo (Loaï Rahman). On épinglera aussi l’excellent jeu de Didier Colfs en lieutenant de police véreux et en animateur de bal niais. Ajoutez à tout cela de magnifiques costumes et une splendide scénographie, magnifiée par de superbes éclairages à la tombée de la nuit.

Inutile dès lors de vous préciser qu’il ne faut pas être fan de comédies musicales pour aller voir West Side Story. En revanche, vous sortirez du spectacle des airs plein la tête (America, Maria…) et des étoiles plein les yeux.

Stéphanie Bocart - La Libre Belgique - 14/7/2023

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