Musical (1996)


Musique: Andrew Lloyd Webber
Paroles: Jim Steinman
Livret: Gale Edwards • Patrica Knop

La Really Usefull Group – compagnie de Lloyd Webber – a remboursé complètement les investisseurs américains et a décidé de tout recommencer…

A ce sujet, Lloyd Webber a suivi les conseils de son avocat et ami John Eastman, qui l’a poussé à être capricieux et à suivre son cœur. Comme d'autres amis proches, dit Lloyd Webber, il «a estimé que si à ce stade de ma carrière, je ne pouvais pas retirer une production, alors le fait de faire un pre-Broadway try-out est une perte de temps. Hal et moi nous sommes séparés, je suis heureux de le dire, sans rancune.»

Gale Edwards avait décliné l’invitation d’assister au show à Washington. Mais quand Lloyd Webber lui a demandé de prendre en charge la création londonienne, elle posa ses conditions. Elle a insisté à traiter plus largement les problèmes raciaux. Ensuite, elle ne voulait personne de la distribution de Washington. Et elle voulait pousser plus avant l'américanisation de l’histoire et le concept de l'autoroute qui va vers nulle part.

Ce n’est pas pour rien qu’elle avait travaillé avec Trevor Nunn. Son implication entière dans le monde du théâtre musical haut de gamme, incombe à Nunn, qui l'avait choisie comme son co-metteur en scène pour la première australienne de Les Misérables lorsque John Caird n'a pas pu se rendre à Sydney. «Quand Trevor dirigeait Les Misérables, si vous baissiez le volume, il aurait pu diriger le Roi Lear. Je ne dis pas les deux œuvres sont comparables. Mais la façon de les aborder est la même, le même processus, la même attention aux détails.» Et le même manque de numéros de danse.

Ayant commencé sa carrière avec du chant et la danse dans son premier Shakespeare (Le Songe d’une nuit d’été), et persévéré dans Cats et Starlight Express, Nunn a ensuite peu à peu effacé tout mouvement de danse dans la comédie musicale britannique moderne. «L'influence néfaste de Les Mis,» comme l’appelle Sleep Wayne. Toute la chorégraphie dans Whistle down the Wind se limite à des jeunes enfants faisant une ronde en chantant leur optimisme à gouverner le monde.

C'est sans doute pourquoi Chicago (photo ci-contre) a reçu un accueil si chaleureux quand le revival de Broadway a été créé à Londres en novembre 1997. Le public manifestait bruyamment sa satisfaction face à toutes ces routines de danse impertinentes, à la vue de toutes ces paires de bas et au délire de ces mouvements sur la musique. Suivirent les revivals de Show Boat et d’Oklahoma!– le premier par Hal Prince, le second par Trevor Nunn, servis tous les deux par des chorégraphies brillantes et intellectuellement pertinentes signées par Susan Stroman, la nouvelle reine de la ‘chorus line’ – qui nous rappelèrent ce qui nous manquait. Des grands shows avec une envolée émotionnelle et un décollage physique.

Gale Edwards considérait que Whistle down the Wind avait déjà la première caractéristique. La seconde serait apporté par un dispositif hydraulique austère mais imposant (imaginé par Peter J. Davison), un grand tronçon curviligne d’une autoroute inachevée qui permettrait d’exprimer deux aspects principaux du spectacle: l'autoroute allant vers nulle part, et un monde à deux niveaux - la partie supérieure et sa communauté bien-pensante de Louisiane, craignant Dieu et dirigée par un shérif en colère, puis la partie inférieure et les vasières Mississippi, où les enfants recréent leur propre religion et leur propre dieu.

Ces deux mondes ne se parlent pas entre eux. S'ils le faisaient, les enfants auraient su qu'il y avait un détenu en cavale, et il n'y aurait pas de spectacle. Le livre était désormais crédité non seulement à Knop, mais aussi à Lloyd Webber et Gale Edwards.

Edwards a notamment imaginé Swallow comme une jeune fille sur le point de devenir une femme, occupant le centre trouble d’une roue d'hommes, dont les rayons convergent vers elle avec divers degrés de menace. «Il y a son père, à qui elle doit apprendre à aimer d'une façon différente depuis la mort de sa mère, il y a l'homme dans la grange pour qui elle devient un agent du salut mais aussi une possibilité sexuelle, et enfin il y a le garçon, son voisin et son idole, mais qui a maintenant seize ans et frime sur sa moto. Cet Amos traîne maintenant avec Candy, dont la monnaie est le sexe, et avec qui il a sans doute une relation physique. Le béguin de Swallow pour lui était un peu comme celle du garçon d'à côté, le mythe de James Dean.» C’est Gale Edwards qui avait eu l’idée à Sydmonton de ce moment dramatique d'hésitation dans le duo Nature of the Beast où un baiser s’échange presque entre Swallow et l'homme. Pour le spectacle à Londres, Edwards a repris les mêmes protagonistes qu’à Sydmonton: Marcus Lovett (qui avait repris à Broadway le rôle-titre dans Phantom of the Opera ou celui d’Alex dans Aspects of Love) et la douce voix de Lottie Mayor (que l’on avait pu admirer dans divers musicals comme Oliver!, Aspects of Love dirigé par Gale Edwards en tournée, Martin Guerre, …).

James Graeme, qui jouait le père à Sydmonton, a également repris son rôle dans la version londonienne. Un autre aspect rassurant pour Lloyd Webber est la présence de John Turner (qui avait joué dans le Jeeves original, avait succédé à Joss Ackland dans le rôle de Peron dans Evita, …), prêtant sa gravité et sa voix considérable au rôle du shérif, pour ce qui est son quatorzième musical dans le West End.


Retour à la page précédente