Jeux de mots et de gestes
autour d'une absente omniprésente … Josephina
Récompensé par trois coups de cœur lors du Festival Vue sur la Relève à Montréal au Québec en avril 2009, élu Meilleur spectacle au Festival International de Théâtre Nuevo Leon à Monterrey au Mexique en Août 2011, a reçu le Prix du Public à la Foire Internationale de Théâtre et de Danse de Huesca en Espagne en octobre 2012 et a été nominé au Prix de la critique 2013 en Belgique dans la catégorie « Découverte ».
Après une tournée dans une dizaine de pays dont l’Argentine, la Bolivie, le Mexique, le Canada, l’Espagne, la France, la Belgique, la Suisse, le Danemark, l’Italie, les Pays-Bas, la Roumanie et la Turquie, "Josephina" pose ses valises au Festival Bruxellons! Pour une représentation exceptionnelle.
Dans son petit studio encombré d’objets et ustensiles variés, un homme est seul, occupé à des tâches ménagères...
Seul, vraiment?
Des détails incongrus viennent perturber son quotidien tranquille.
Tranquille, vraiment?
Cet homme a quelque chose qui l’obsède. Quelque chose ou quelqu’un?
Peu à peu, comme des indices sur une scène de crime, on relèvera des traces, et avec quelques flash-back, on remettra les pièces d’un puzzle en place et on devinera ce qui s’est passé dans la vie de cet homme, de son couple: Alfredo et Josephina...
Elle s’était montrée sous la forme d’un bras ou d’une chaussure, la voici toute entière à présent et ils s’enlacent, dansent sur le son éraillé d’un vieux pick-up ou, aussi, évoluent de manière étrange...
Par des extraits de «Plume» de Michaux, du «Somnambule» de Gao Xingjian ou de «Histoires d’hommes» de Durringer..., le texte est présent mais en modestes proportions, entrant parfois en collision avec la gestuelle. Car ce sont non seulement les corps, jouant parfois aux objets, mais les objets mêmes qui s’expriment majoritairement.
Ils le font d’une manière tout à fait originale, inattendue et détournée parfois, comme s’ils étaient dotés de vie... « Objets inanimés avez-vous donc une âme » ? Mais non, point de Lamartine ici, ni de romantisme, l’amour de cet homme pour cette femme, c’est de la passion, une passion qui serait allée jusqu’au drame, et qui torture encore Alfredo.
Les corps si souples, étroitement unis des deux amants (avec tendresse, avec violence) sont ceux de deux comédiens-danseurs; leur gestuelle et leurs mouvements sont ceux de comédiens-mimes. Sandrine Heyraud et Sicaire Durieux font mieux que camper des personnages, ils en dessinent les caractères en mille détails précis.
Et les sons : musiques, voix, mots, comme les silences éloquents, contribuent à former un bel objet théâtral à nul autre pareil car la forme est un mélange raffiné qui tient du mime, de la pantomime, de la danse....
Poésie, mystère, burlesque se mêlent sur un fond latino et pour cette fois, on parlera, vraiment, d’ambiance surréaliste ! Ainsi chaque spectateur aura l’occasion de se (re)construire une histoire, à moins qu’il n’ait été entraîné bien loin dans une balade onirique...
Un style tout à fait personnel, surprenant, unique
Après «Ilö», programmé au Théâtre des Doms d’Avignon et qui continue une belle carrière, «Josephina»
est la deuxième création de la jeune compagnie ChaliWaté (terme ghanéen résumé par la notion de «partir ensemble sur la route»). Elle a été créée en 2005. S’adressant à tous les publics, «Josephina» a déjà beaucoup tourné, récoltant au passage de nombreux prix au Québec, au Mexique, en Espagne et, après la présente pause-retour au pays natal, le spectacle repart faire son tour du monde entre Bolivie et Ecosse...
ChaliWaté se prévaut de trois grandes influences de départ, de trois maîtres du mime: Étienne Decroux, Mar- cel Marceau et Jacques Lecoq, mais s’est approchée d’autres techniques théâtrales comme le jeu clownesque, le théâtre d’objet ou la danse, pour en façonner ce style qui n’appartient qu’à elle mais que pourtant
ses deux promoteurs, Sandrine Heyraud et Sicaire Durieux, rêvent de faire découvrir car ils sont également formateurs et pédagogues.
Suzane Vanina — Rue du Théâtre (Bruxelles) — Mars 2013