Une pièce irrésistible de 2003 du père de «Bienvenue chez les ch’tis».

Pétages de plomb (au propre comme au figuré), inondations, chutes de balustrade, courts-circuits, bruits de perceuse, martèlements, fils et tuyaux en pagaille, poussières, coups de pinceau et coups de gueule vont être votre programme d’un soir. Peinture satirique d’une certaine bourgeoisie snobinarde, la pièce croque de la même façon l’image que l’on se fait en général des ouvriers du bâtiment.


Quoi de mieux que La vie de chantier pour essuyer les plâtres de la nouvelle édition du festival Bruxellons !? Avec son humour en béton, des comédiens bien charpentés et Daniel Hanssens comme architecte, la pièce de Dany Boon nous a vissés à nos sièges, jeudi, pour une première sous un ciel sec.

Si l’eau a épargné le public, on ne peut pas en dire autant de la scène arrosée par d’inquiétantes fuites dans les tuyauteries, une tuile parmi d’autres sur ce fameux chantier. Pour faire une surprise à sa femme et sa fille, en pèlerinage au Vatican, Charles Boulin a vendu leur appartement de l’avenue Louise pour rénover un hôtel particulier de la banlieue. Alors que les travaux sont censés être finis depuis un mois, il découvre un capharnaüm : rien n’est monté – ni murs, ni planchers – tandis que les installations d’eau et d’électricité sont plus que douteuses. La surprise tourne au cauchemar quand Charles Boulin explique à sa femme qu’ils doivent emménager dans ce taudis et cohabiter avec deux ouvriers maniant les bévues à la truelle. Pas moyen de pendre la crémaillère si ce n’est aux câbles qui pendouillent du plafond. Les ennuis pourtant ne font que commencer car, comme dit un des ouvriers, « c’est l’essence même des travaux d’être en retard ».

Qui n’a pas connu de plombier venu vous resserrer un petit écrou pour finalement remplacer toute la tuyauterie ? Qui n’a jamais maudit des ouvriers censés boucler le boulot en un mois et qui vous réveillent toujours au marteau-piqueur six mois après ? Si on rit autant devant cette Vie de chantier, c’est surtout pour son évocation bien sentie d’une situation que, au mieux, nous redoutons, au pire, nous connaissons. Evocation hilarante à l’image de ce jeans tombant obstinément sur le bassin d’un des ouvriers, révélant un début de fesses tapageuses. Cliché ô combien familier !

On glousse devant l’avalanche de catastrophes en plomberie ou menuiserie – et leurs justifications absconses. Mais on s’amuse aussi des quiproquos sentimentaux, la fille du couple bourgeois s’entichant du maçon portugais. C’est d’ailleurs cet ouvrier dévastateur qui s’avère le mur porteur de cette comédie marteau. Hilarant et attendrissant, Pierre Pigeolet nous scie littéralement dans le rôle du maçon fabulateur et dragueur. Si Michel Hinderickx en fait un peu trop dans la peau de Charles Boulin, la distribution fait de la belle ouvrage.

Catherine Makereel - Le Soir - 25/7/2009

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