"Jacqueline Bir est formidable. Drôle, bouleversante, cinglante" - Le Soir

Jacqueline Bir et Alain Leempoel se sont choisis pour défendre cette partition magnifique, la rencontre au sommet d’une mère et son fils. Ils vivent ce projet du bout de leur être, en orfèvres du jeu, en équilibristes des mouvements de l’intime, en éveilleurs d’esprit. Sous la conduite attentive et amicale de Pietro Pizzuti, ils portent par une tendre complicité ce dialogue engagé qui ne manque pas de distiller l’humour et l’émotion au fil des scènes.


Après soixante ans de carrière, Jacqueline Bir foule toujours les planches avec succès. Jeudi soir, au Théâtre le Public, la salle était debout pour l’applaudir avec Alain Leempoel, à l’issue du spectacle "Conversations avec ma mère". Un fait plutôt rare à Bruxelles et nul doute que l’émotion des spectateurs était due autant à la pièce juste et sensible qu’à la performance de ces deux acteurs dont le duo complice fonctionne à merveille.

Alain Leempoel incarne Jaime, père de famille d’une cinquantaine d’années qui préfère toujours passer un coup de téléphone rapide que partager un repas avec sa mère, pétillante octogénaire. Pourtant, ce soir-là, il se déplace en personne pour lui annoncer une mauvaise nouvelle : la crise économique a frappé, il a été licencié et doit vendre l’appartement où vit sa mère. Entre la surveillance de la cuisson de son pot-au-feu et les piques destinées à la belle-mère de son fils qu’elle ne supporte pas, Mama fait comme si elle n’avait rien entendu, élude la question puis finit par refuser catégoriquement de déménager face à l’insistance de son fils qui joue sur la corde sensible en parlant des enfants qui devront changer d’école. Désemparé, Jaime se livre complètement à sa mère qui le questionne habilement… chômage, manque de désir au sein de son couple, absence de communication avec ses propres enfants.

Huis clos poignant

Avec ces "Conversations avec ma mère", adaptées du film "Conversaciones con Mamá" de l’Argentin Santiago Carlos Oves, Pietro Pizzuti met en scène un huis clos poignant où, sous couvert d’une simple discussion avec ses détours, ses non-dits, ses incompréhensions et ses répétitions, se dessine une relation mère-fils d’une grande justesse, bien loin des clichés. Entre duel et duo amoureux, la théâtrale Jacqueline Bir drôle, attentionnée et parfois cinglante répond à la sobriété d’Alain Leempoel qui ne verse jamais dans le pathos et confère une belle sincérité à son personnage.

La mise en scène de Pietro Pizzuti, efficace et réglée avec précision, joue avec les surprises amenées dans la seconde partie de ce texte plein d’humanité.

Camille de Marcilly - La Libre - 5/9/2014

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