«Suis-je aimé(e) pour moi-même?»
Importante question, non?

C’est à cette question que veulent répondre les personnages du "Jeu de l’amour et du hasard": les amoureux, Dorante et Silvia, déguisés en domestiques, se font prendre à leur propre jeu. Le spectateur, complice des manipulations, assiste alors à tous les troubles possibles du cœur, du langage et de l’identité.


Auteur français déclaré comme mineur par la génération des Encyclopédistes, réputation qu'il conservera jusqu'au milieu du XXème siècle.

nous n'avons que très peu de documents sur la vie de Marivaux et que de nombreuses informations à son sujet sont erronées. Par exemple : sa date de naissance est inconnue (on ne connaît que sa date de baptême), le nom « Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux » n'apparaît jamais comme tel — Marivaux est né Pierre Carlet, puis se fait appeler Pierre Decarlet, puis signe Carlet de Marivaux, etc….
Elevé en province, Marivaux fait ses études à Paris et s'essaye dans le roman burlesque. Il débute en 1720 au Théâtre-Italien et au Théâtre-Français. Son théâtre emprunte ses conventions à la Commedia dell'Arte: il crée des types sur lesquels il peut broder des variations, se sert du travestissement, privilégie l'amour comme ressort de la comédie.

Son premier texte est une comédie d'intrigue en un acte et en vers le Père prudent et équitable, ou Crispin l’heureux fourbe jouée dans un cercle d'amateurs en 1706 et édité en 1712. Sa rencontre avec Fontenelle, et la fréquentation du salon de la très spirituelle Madame de Lambert, sont déterminantes pour sa formation. Il y rencontre des «Modernes» et s’y initie à une forme de «préciosité nouvelle», qui donnera naissance au «marivaudage». Il développe alors son observation critique, s’engage dans la bataille contre les classiques et s’essaie à de multiples genres : roman parodique, poème burlesque ou chronique journalistique. Le parodique est alors sa principale voie d’écriture. Loin de déconsidérer les œuvres classiques, il reprend, selon l'esprit néo-précieux qui traite de façon «enjouée» les «grands sujets», tout ce qui fait le patrimoine culturel des écrivains classiques et le travestit en œuvres originales et décalées par rapport à l’usage. C'est ainsi qu'il écrit un Télémaque travesti en 1714-1715 (où il évoque la misère des huguenots), puis une Iliade Travestie en 1716, sa quatrième œuvre publiée et la première signée «M. de Marivaux en 1718».

Il est considéré comme un brillant moraliste, sorte de nouveau La Bruyère. Il se marie en 1717 avec Colombe Boulogne, fille d'un riche avocat, dont la dot permet au ménage de vivre dans l'aisance. Il perd son père en 1719, l'année de la naissance de sa fille, Colombe. Mais il est ruiné par la banqueroute de Law en 1720, perd sa femme en 1723, et doit alors écrire pour vivre et élever sa fille.

Sa raison d’être est toute trouvée, ce sera le théâtre. Il s'essaie à la tragédie classique en cinq actes et en vers avec Annibal, joué en 1720 par les comédiens du Roi, mais ce n'est pas une réussite.

Son premier succès, la même année, il le doit à Arlequin poli par l'amour joué par les acteurs italiens de Luigi Riccoboni. Il apprécie le jeu des comédiens italiens et devient l'auteur attitré de la troupe. La jeune et talentueuse Silvia Balletti, la prima amorosa, devient son interprète idéale et il écrit spécialement pour elle. Il révolutionne le genre de la comédie sentimentale, qu’il explore au travers des deux Surprises de l’amour ou de La Double Inconstance, mais surtout de ses pièces devenues de grands classiques du répertoire: Le Jeu de l'amour et du hasard (1730) et Les Fausses Confidences (1737).

On peut voir en Marivaux un utopiste, qui utilise le théâtre comme un lieu d'expérimentation sociale (l'Ile des Esclaves, 1725, où maîtres et serviteurs échangent leurs rôles, La Colonie, où les femmes veulent établir une république). Il existe aussi un Marivaux romanesque, qui emprunte à la vogue des romans tragiques et des aventures de nobles déguisés: Le Prince travesti (1724), le Triomphe de l'amour (1732).

À partir de 1733, il fréquente le salon de Claudine de Tencin, qui devient pour lui une amie précieuse. Grâce à elle, il est élu contre Voltaire à l’Académie française en 1742, et y prononcera plusieurs discours: Réflexions en forme de lettre sur le progrès de l'Esprit humain (1744), Réflexions sur l'esprit humain à l'occasion de Corneille et de Racine (1749), Réflexion sur les Romains et les anciens Perses (1751) . Il ne compose plus alors que quelques pièces à destination de la Comédie Française, qui sont éditées, mais pas jouées, et un dialogue, L'Éducation d'un prince. Malade depuis 1758, il succombe à une pleurésie le 12 février 1763.

Marivaux a été l'auteur le plus joué de la première moitié du XVIIIème siècle, avec Voltaire.
Dans les années 1950-60, redevenu à la mode, Marivaux permet à la nouvelle génération de metteurs en scène de s'essayer à de nouvelles interprétations: Vitez, Vilar, Planchon, Chéreau, entre beaucoup d'autres.

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