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Anna Politkovskaïa
Anna Stepanovna Mazepa, née le 30 octobre 1958 à New York. Son père travaillait au sein de la délégation soviétique à l’ONU. Le nom de Mazepa la lie en droite ligne avec Ivan Mazeppa, farouche défenseur de l’indépendance de l’Ukraine contre le pouvoir russe. Des siècles plus tard, Mazeppa demeure une figure d’incivilité contre les russes, et rejoint la longue liste des « terroristes » et autres « criminels » anti-russes.

Elle s’inscrit à la faculté de journalisme de l’Université de Moscou. Elle se marie avec Alexandre Politkovski. Ils ont rapidement deux enfants, un garçon, Ilia et une fille, Véra. Elle vivote entre plusieurs petits boulots dans des journaux et revues à la solde du soviétisme. C’est en 1985, avec l’arrivée au pouvoir de Mikhaïl Gorbatchev, que la société bouge. Le nouveau gouvernement souffle un vent réformateur : les journalistes sont encouragés à parler de tous les sujets même ceux qui étaient interdits précédemment. Le régime croit que c’est un moyen de réveiller la société russe qui semble anesthésiée. Une émission, « Vzgliad », le regard, est l’emblème de ce nouveau ton : on y parle de tout, de toxicomanie, du scandale des orphelinats, de la vie dans les Eglises, dans les mouroirs de Tchernobyl.

Anna travaille dans un journal ouvertement démocratique où elle écrit des articles à caractères sociaux. Nous sommes en pleine glasnost et perestroïka, c’est le temps du grand déballage. Bientôt, les spectres anciens vont se réveiller avec l’arrivée de Boris Eltsine au Kremlin. Commence alors la longue liste des morts : Vlad Listiev, producteur de l’émission Vzgliad est assassiné. Le mari de Anna travaillait pour l’émission. Ils comprennent que le temps de la liberté touche à sa fin ! Il sombrera dans l’alcool. Anna et Alexandre se sépareront en 1999. Elle a 41 ans, Anna commence à travailler pour Novaïa Gazeta. Vladimir Poutine est le Premier Ministre de Eltsine. Les radicaux tchétchènes font des raids au Daghestan, et Vladimir Poutine saisit ce prétexte pour relancer la guerre en Tchétchénie. Le 1er octobre, l’armée russe avance vers Grozny. Le 31 décembre, Eltsine passe le pouvoir à son poulain, Poutine. C’est à ce moment qu'Anna va se plonger dans l’univers de la guerre. Très vite, elle devient une des plumes emblématiques du journal. Mais ces articles dérangent : elle trouve un revolver sous son paillasson, reçoit des coups de fil anonymes, des courriers d’insultes. L’îlot démocratique se réduit de plus en plus en Russie et Anna se démène. Jacques Chirac et Gerhard Schröder trouvent Poutine rempli d’intelligence. Le samedi 7 octobre 2006, Anna Politkovskaia est assassinée par balles dans l’entrée de son immeuble.

Un combat contre la suppression lente mais certaine de la démocratie en Russie. Une mort qui doit s’entendre comme l’ombre cannibale du pouvoir absolu.

«Sa plume acérée s’attache à fouiller les plaies comme pour les vider du pus qui s’y est accumulé depuis trop longtemps.» (Alain Guillemoles)

Liberté de la presse, liberté de l’individu, liberté du citoyen. Regarder les exactions du pouvoir, affronter les audaces sauvages de l’état, refuser d’être complice de l’horreur.
Mesurer la démocratie....

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