Emotion, signée Thierry Debroux

Le Roi Lune de Thierry Debroux redonne vie à un des personnages mythiques de l'histoire de l'Europe. Un de ces hommes né à une époque qui n'est pas la sienne et qui refuse de se soumettre à l'air de son temps. Son seul et unique moteur? La passion. Il aime le beau, l'art. Et il va mettre une énergie considérable, tant humaine que financière, au service de Richard Wagner, son ami, afin qu'il puisse créer librement ses opéras grandioses. Il mourra seul, fou, suicidé dans cinquante centimètre d'eau, sur le bord d'un lac.


Un spectacle primé plusieurs fois dont le Prix du Théâtre en tant que Meilleur Acteur en 2005 conjointement pour Julien Roy et Benoît Van Dorslaer.
Au vu d’un tel plébiscite, la critique devient difficile et il y a de quoi.
Thierry Debroux (l’auteur) nous livre un récit très documenté sur Louis II de Bavière.
Mais bien plus qu’une simple biographie, il nous plonge dans l’univers tourmenté de ce roi très particulier. Un homme qui longtemps a vécu comme en ermite, invitant le soir à sa table rien de moins que les défunts fantômes des grands de ce monde.
Un homme que sa folie a mené à la destitution et à l’internement, pour finir noyé … dans 60 centimètres d’eau.
Un personnage dérangeant et tout à la fois attachant, ses mots sont de perpétuelles volte-face et surtout d’une rhétorique très naturellement à l’épreuve de toute logique classique, un personnage à l’humour cinglant et cynique, volontaire, exigeant, tourmenté, agressé et finalement très clairvoyant.
Un homme au destin étrange, fascinant, un Roi Fou plus connu pour ses châteaux que pour son amour de la beauté et des arts.
Un homme probablement trop épris de ceux-ci, trop exigeant et donc considéré comme inadapté pour son temps, qui probablement aujourd’hui, serait considéré comme un mécène généreux doublé d’un visionnaire.
Mais Thierry Debroux nous livre surtout un passionnant dialogue entre Louis II (Julien Roy), son ministre (Benoît Van Dorslaer) et son compagnon-confident du moment (Alexandre Tissot).
Le premier va obliger le second à partager son repas et ensuite à se livrer au procès de… Louis II.
Une situation qui ne manque pas de piquant et surtout qui ne sera pas avare en retournements.
Le spectateur est en permanence mystifié, l’inattendu succède au surprenant, le rire au drame.
Le Roi Lune est un véritable jeu de dupes, superbement interprété et mis en scène dans une scénographie sobre (une simple table de banquet rempli l’espace scénique).

Toute l’importance est ainsi rendue au texte et à l’excellence du jeu des trois acteurs.

Plaisir d'offrir - 28/12/2006 - Muriel Hublet

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