Le nouveau spectacle de Bruno Coppens…

L'ami Coppens nous revient avec un nouveau seul en scène qui va enfin réparer un oubli majeur du théâtre : parler du trac… du public ! En effet, si les comédiens se gargarisent en parlant du «trac de l'acteur», ils oublient celui, majeur, du spectateur !

Ce «verbo-moteur», comme l'appellent les Québécois, déploiera tout son talent pour tenter de trouver l'origine du trac pour mieux le… traquer. Quand est-il apparu la première fois ? Lorsqu'Adam et Eve, si naïfs, débarquèrent sur le monde ? Bruno retracera des grands moments d'hier (la Dernière Cène comme vous ne l'avez jamais imaginée) mais aussi d'aujourd'hui (Bart De Wever dans "Rendez-vous en terre inconnue") pour tenter de répondre à cette angoissante question : puisque l'espérance de vide augmente chaque année, est-il possible de vivre «décontraqué» ? Ce spectacle vous fournira les méthodes pour dompter votre trac dans la vie quotidienne.


Pourquoi cette envie de parler du trac du public ?
B.C. : Etre assis dans le noir, entouré d’inconnus, ne sachant quel rôle jouer dans cette salle de spectacle, angoissé à l’idée d’être appelé sur scène et en même temps, le désirant inconsciemment. C’est un trac monumental dont on ne parle jamais ! Quand je vais au spectacle, je m’installe dans mon fauteuil, j’ai envie que tout se passe bien. On espère que le voisin ne va pas rigoler trop fort, qu’il ne va pas regarder son gsm. Le spectacle commence avec ce trac là et puis déborde sur la relation amoureuse, le trac de parler aux autres. On voudrait tous éviter le trac mais, en même temps, sans lui, on s’ennuierait. Parler du trac, c’est parler du désir de vivre, de prendre des risques, de ne pas être paralysé par la peur de faire les choses.

Et vous, vous avez le trac ?
Oui, mais j’essaie de me rassurer en faisant les vérifications lumières avec le régisseur, ou en faisant un petit échauffement vocal. Bien sûr, il reste ce gros quart d’heure où on attend tout seul dans la loge. Où l’on se dit : "Bon, faut y aller". Une demi-heure avant le spectacle, j’aime entendre la salle se remplir, sentir les différents publics, entendre les commentaires. Du coup, Eric De Staercke a imaginé mettre ma loge sur scène, dès le début du spectacle, ça m’évite d’attendre dans le fond des coulisses comme si j’étais puni.

D’où vous vient ce goût des mots ?
À 16 ans, j’ai découvert Jacques Prévert et Boris Vian grâce à un formidable professeur de français. J’ai découvert qu’on pouvait jouer avec les mots et j’ai plongé dedans. Avec les mots, on peut raconter le monde autrement, donner un point de vue. Prenez l’affaire Dieudonné. On ne peut pas arrêter tous les gens qui font ce fameux geste qu’il a popularisé. Je me suis demandé comment parler de ça et j’ai parodié la chanson Cannelle d’Antoine en Quenelle, pour se demander si tout cela n’est pas devenu un fond de commerce pour remplir des salles plutôt que de l’engagement politique.

Cette gymnastique du jeu de mots ne vous lasse jamais ?
Moi, non, mais j’avoue qu’elle a fatigué mon entourage. Quand mes enfants étaient petits, je testais avec eux. Un jour, ils m’ont dit : "Papa, on n’en peut plus". Aujourd’hui, j’essaie de me retenir, et de garder ça pour le boulot, pour mes chroniques dans l'Echo ou Marianne, et à la radio dans "On n’est pas rentré" sur la Première.

Catherine Makereel - Le Mad - 8 janvier 2014

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